Les banques rejettent la taxe Tobin

La Fédération Bancaire Française s’élève contre l’instauration d’une taxe unilatérale sur les transactions financières qu’elle juge d’emblée « inefficace et contre-productive pour l’économie française », exactement comme Tobin le disait lui-même.

Au sujet de l’adoption par la France, seule, de la taxe sur les transactions financières (TTF), dite taxe Tobin du nom de son soi-disant fondateur, la FBF a fait entendre qu’elle pénaliserait fortement la compétitivité et pèserait sur le financement de l’ensemble de l’économie nationale. Pour la FBF, cette taxe n’a de sens que si elle est instaurée à un niveau mondial, touchant internationalement les transactions financières sur toutes les places boursières.

Le financement de l’économie française mis en jeu par une mesure de régulation des marchés inopérante

Le prélèvement de la taxe Tobin renchérit par définition le coût des opérations financières. L’intérêt des opérateurs est alors de délocaliser leurs affaires vers d’autres places boursières que la place parisienne qui n’était déjà pas d’une grande envergure. Cela aura nécessairement un effet dissuasif sur les projets d’installation d’éventuels nouveaux acteurs du financement de l’économie dans notre pays.

Or, dans le contexte de rigueur économique de la France, où le besoin de croissance et de création d’emplois est béant, la présence d’acteurs et d’outils de financement efficaces est plus que jamais requise. Le moment est peut-être mal choisi de les détourner.

Dans ces conditions, on pourrait même douter des réelles intentions de ceux qui persévèreraient à vouloir investir en France.

En outre, la FBF insiste sur le rôle primordial et croissant des marchés en matière de financement de l’économie, des entreprises et de l’Etat. Selon elle, ce n’est pas une taxe qui pourra réguler le fonctionnement des marchés et limiter leur volatilité, mais une réglementation adaptée pour garantir la sécurité et la transparence. A l’inverse, la taxe Tobin a plutôt pour rôle de freiner les mouvements de capitaux.

Un cumul de taxes grevant l’activité bancaire française

Contrairement aux banques étrangères, les établissements bancaires français voient leur activité assujettie à une batterie de taxes spécifiques à laquelle va se rajouter la taxe sur les transactions financières.

Au nombre de ces taxes inconnues à l’étranger, on peut citer la taxe sur les salaires qui représente une ponction de l’ordre d’1,6 milliard d’euros par an. Aussi, les deux dernières années ont également été lourdes d’inventions fiscales.

A vu le jour la taxe bancaire sur le risque systémique, laquelle a rapporté  460 millions d’euros à l’Etat en 2011 mais qui devrait atteindre le milliard d’euros dès 2013. Il faut également citer les nouvelles cotisations pour le fonctionnement de l’ACP, de l’AMF (depuis 2010 et 2011) et la cotisation exceptionnelle pour le relèvement du plafond de garantie des dépôts. Tout cela est déjà lourd à digérer d’autant que le secteur bancaire français a accusé, du fait de la réforme 2009 de la taxe professionnelle, un coût supplémentaire de l’ordre de 200 millions d’euros par an.

Cet acharnement sur les banques est très mal reçu par la FBF qui rappelle que c’est un secteur économique qui ne coûte rien au budget de l’Etat (et un contre nos pans entiers d’économie subventionnés), qui doit s’adapter aux nouvelles contraintes règlementaires et à l’environnement économique défavorable (et deux contre les politiques économiques déséquilibrées) afin de financer les industries et assurer la compétitivité du pays (et trois contre le blocage du secteur bancaire).

Conclusion, taxer les mouvements de capitaux au seul échelon national fera rapidement sentir ses effets désastreux, comme l’a d’ailleurs tristement expérimenté la Suède de 1984 à 1991. Le principe de cette taxe, récupéré et interprété par le courant socialiste, avait été émis par James Tobin en 1972 dans le contexte particulier de l’abandon du système de Bretton-Woods (la fin de la convertibilité or du dollar), cherchant à tempérer les craintes de l’époque. Sa proposition n’avait pas été retenue et c’est bien plus tard qu’elle été récupérée malgré l’opposition de son auteur, favorable au libre-échange, qui s’est élevé contre ce détournement.